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Les aides à l’innovation : un rapport exploratoire de M. Lewiner

En mars dernier, l’Inspection Générale des Finances (IGF) a publié discrètement sur son site un rapport “exploratoire” de M. Lewiner. Cette publication, suivie quelques mois plus tard du rapport de la cours des comptes, moins généraliste mais plus critique constituent la marque d’une prise de position nouvelle de l’administration sur le très complexe système français d’aides à l’innovation.

Le rapport Lewiner est un inventaire, assez critique qui souligne les (quelques?) incohérences du système. Il ne s’agit pas d’une évaluation, encore moins d’une comparaison avec des systèmes étrangers. Une lecture approfondie est indispensable

Un peu de sémantique élémentaire :

Nous avons évidemment relevé quelques imprécisions sur la définition de l’innovateur, de l’entrepreneur et de l’inventeur. Ces confusions expliquent l’importance donnée à la recherche qui conduit à l’invention dans le meilleur des cas, ce qui n’est pas pareil que l’innovation ! Le terme d’entrepreneur n’apparaît que 12 fois alors que le terme recherche apparaît 37 fois, quant à celui d’innovateur, il n’apparaît qu’une seule fois alors que celui d’innovation est utilisé plus de 250 fois. Ces termes ne sont pas définis avec précision.

Pour compléter cette petite approche sémantique, on note les scores suivants : 96 pour recherche, 55 pour chercheur, 3 pour inventeur et 14 pour “invent”  et 1 pour innovateur.

Autre terme qu’on voudrait préciser : l’écosystème de l’innovation qui est une sorte de “smart-raccourci” qui sonne bien et rapproche astucieusement le système d’innovation avec l’écologie. Mais c’est un abus de “sonorité” : l’écosystème est un concept écologique assez ancien (du XIX°) qui désigne l’environnement d’un être vivant. Il s’appliquerait donc à l’innovateur ou à l’entrepreneur. Pas au dispositif innovant.

Ces corrections de lecture étant précisées, nous pensons que ce rapport est un remarquable travail d’inventaire.

Les grands arbitrages entre l’innovation dirigée par l’Etat et l’innovation régie par le marché sont soigneusement contournées. Le rapport Lewiner se concentre sur ‘innovation issue de la science après avoir été savamment nourri dans les laboratoires étatiques ! C’est naturellement la voie royale de l’innovation incrémentale et donc en termes de valeur créée, c’est le point le plus important. Dans la course au CA et à la valeur créée (qui se résument dans la valeur boursière de l’entreprise), IBM a pu tranquillement regarder Apple ou MicroSoft pendant plus de 10 ans. Il est donc légitime de mettre l’accent sur cette innovation.

Les grandes lignes du rapport :

Le rapport ne peut être résumé en quelques lignes et mérite d’être lu et relu, tant il utilise l’effet d’annonce, voir la litote, pour louer un système dont il souligne les qualités tout en soulignant les insuffisances … La synthèse illustre  bien la méthode – Extrait –  :

Après trois mois d’étude, de nombreux échanges avec les experts et les acteurs de l’innovation en France, l’analyse de la réussite des meilleurs écosystèmes d’innovation mondiaux, nous sommes convaincus que notre système est complet, en progrès, mais pas assez performant, et qu’il serait illusoire voire dangereux de s’attaquer à un point seulement de la chaîne du soutien à l’innovation – une chaîne n’est aussi solide que son maillon le plus faible. Nous proposons 55 mesures pratiques, tout au long de cette chaîne, pour gagner en impact et en lisibilité, sans heurter inutilement un paysage qui ne pourra ni ne devra jamais ressembler à un « jardin à la française ». L’innovation se nourrit de paradoxes irréductibles, qu’il faut accepter et parfois encourager pour que demain plus qu’aujourd’hui l’économie française soit à l’avant-garde.”

Bref, ça ne va pas si bien qu’on pourrait le penser. Et les (nombreuses) lignes de redressement  sont là pour le certifier :

1 – “Une première série de mesures urgentes concerne la levée d’obstacles réglementaires à la bonne valorisation de la propriété intellectuelle. 

2 – “Dans le même esprit de favoriser la création de valeur à partir de la propriété intellectuelle, il est fortement recommandé que les établissements de recherche et leurs structures de valorisation, renoncent à exiger des start-up, comme trop souvent encore, des redevances onéreuses sur les brevets qu’elles leur cèdent, redevances représentant une charge impossible à assumer aux stades amont de leur développement.

3 – “Des éléments d’incertitude affectant la fiscalité devraient désormais être durablement stabilisés.

4 – “À la marge, des améliorations des grands outils de soutien indirect à l’innovation seraient très appréciables : le guide du CIR devrait ainsi préciser comment les critères d’identification de la R&D s’appliquent à l’innovation telle qu’elle se met en œuvre dans le secteur du numérique ; un alignement du taux du crédit impôt innovation (CII) sur celui du CIR serait de nature à éviter des comportements d’arbitrage.

5 – “Le financement direct de l’innovation appelle une appréciation globalement positive : objet d’un effort constant depuis une dizaine d’années, il se stabilise aujourd’hui autour de 2,5 Mds€, avec une palette d’outils très complète. Ce constat général favorable appelle toutefois plusieurs recommandations en complément.

6 – “Par ailleurs, des difficultés ponctuelles mais réelles dans la chaîne de développement des entreprises innovantes appellent des actions correctrices

7 – “Il est proposé de commencer à constituer l’agence pour l’innovation de rupture à partir d’une enveloppe représentant les deux tiers des ressources du FII.

8 – “Il est proposé de commencer à constituer l’agence pour l’innovation de rupture à partir d’une enveloppe représentant les deux tiers des ressources du FII.

  • “Nombre d’interlocuteurs issus du monde de l’entreprise ont fait état de l’absence réelle d’une fonction économique chargée de l’innovation et de la compétitivité suffisamment bien structurée, complète et influente au sein de Bercy.
  • “La complexité du paysage des aides à l’innovation avait été portée à l’attention de la mission.
  • “Les délais et les complexités administratives affectant l’innovation médicale en France sont souvent un handicap, susceptibles de conséquences sérieuses s’il n’y est pas remédié.
  • “La commande publique doit devenir une composante active de notre politique d’innovation, comme c’est souvent le cas dans des pays proches.”

A part ça, tout va bien !

 

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